Transformation énergétique : comment les territoires urbains accompagnent les entreprises

De nouvelles méthodes d'accompagnement et d'aides directes sont testées auprès des entreprises qui souhaitent s'engager dans la Transition écologique et énergétique.
Dans l’urgence des tensions inflationnistes actuelles, dans le cadre de la mise en œuvre du décret tertiaire ou face à l’impératif de décarbonation à moyen terme, la réduction de la consommation énergétique et des émissions de gaz à effet de serre des entreprises est un enjeu mondial et local majeur. Près de 75% des gaz à effet de serre sont issus de l’activité économique.
A l'image du dispositif Mur Mur lancé par Grenoble Alpes Métropole, du Contrat de Transformation proposé par la Métropole Européenne de Lille ou de la démarche Lyon Eco Energie déployé par la métropole rhodanienne, les grandes intercommunalités urbaines testent actuellement de nouvelles méthodes d'accompagnement et d'aides directes aux entreprises qui souhaitent s'engager dans les transformations énergétiques et écologiques.
De nouvelles façons d’accompagner les entreprises
En partenariat avec des acteurs consulaires ou des réseaux entrepreneuriaux, en coordination avec les régions ou l'Ademe, ciblés sur des diagnostics, des appuis directs à l'investissement ou des engagements dans des fonds plus transversaux, ces dispositifs dessinent, deux ans après les innovations liées à la crise sanitaire de Covid-19, de nouvelles façons d'agir auprès des entreprises pour les intercommunalités urbaines. Ces interventions s’adaptent aux réalités des tissus économiques locaux et s’intègrent dans des stratégies territoriales de transformation différenciantes.
Les questionnements liés au dérèglement climatique provoquent une accélération des sollicitations par les entreprises des dispositifs proposés par les métropoles et agglomérations. Ces dispositifs impactent plusieurs centaines d'acteurs économiques sur chacun des territoires concernés, prêts à prototyper et tester de nouveaux partenariats publics-privés. L'enjeu de massification est donc majeur. Il supposera de travailler, une fois les principaux outils stabilisés, sur l'automatisation et la digitalisation de certaines démarches.
Des aides intégrées à des démarches plus transversales
Ces nouveaux outils, nés pour certains des relations nouées entre entreprises et intercommunalités pendant l'urgence de la crise sanitaire, sont conçus, positionnés et déployés dans des cadres stratégiques plus vastes, au sein desquels ils trouvent leur cohérence tels que les Plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET) ou les démarches RSE. Ils ne sont pas développés indépendamment d'autres outils dédiés à la transformation énergétique de l'économie des territoires : EuraClimat à Lille, pour structurer l'incubation et l'accélération d'entreprises dédiées à la transformation énergétique ; les atlas solaires outillant les entreprises qui souhaitent s'équiper de panneaux photo-voltaïques ; l'accès aux réseaux de chaleur publics ou privés..
Les intercommunalités urbaines se mobilisent au titre de leur compétence exclusive en immobilier d'entreprises et concentrent donc leurs dispositifs sur l'enveloppe bâtimentaire des entreprises candidates. La décarbonation des process (machines, approvisionnement, logistique...) reste pour l'instant dans le giron des régions ou de l'Etat, avec le plan France 2030, même si certains territoires s'engagent sur ce champ, à l’image du Fonds « Transition juste » actuellement à l'étude à Grenoble. A ce stade, l'éco-conditionnalité des aides reste théorique mais l'accompagnement à la transformation du bâti participe généralement d'un projet plus vaste de décarbonation de l'ensemble de l'entreprise.
Un projet d’entreprise
L'implication de l'ensemble des salariés émerge également comme un facteur clef de succès des aides attribuées : la mise aux normes énergétiques est d'autant plus efficace qu'elle s'accompagne d'une sensibilisation et d'une mobilisation de l'ensemble des parties prenantes, et notamment du personnel, sur le projet de l'entreprise comme sur leur rôle dans sa mise en œuvre.
Les dispositifs présentés priorisent nettement les (très) petites entreprises, voire les sous-traitants des grands comptes du territoire, comme à Lille. Le « sourcing » est essentiel, de même que la communication locale et la mobilisation plus transversale des compétences territoriales de l'accompagnement des entreprises : chambres consulaires, agences locales de l’énergie et du climat (ALEC), développeurs régionaux... Notons que les chambres consulaires vont chercher à privilégier leurs propres outils et à prioriser des conventionnements avec les intercommunalités au sein desquels elles cherchent à valoriser financièrement leur intervention.
La mobilisation des métropoles et agglomérations sur ces questions renouvelle l'appréhension des relations avec les régions. Pour l'instant, les coopérations voire les dispositifs mutualisés sont modestes, l'écriture des conventions d'application des SRDEII sur les aides directes peut aider à une structuration plus forte.
Une transformation du métier de développeur économique
Plus globalement, la montée en puissance de ces outils participe d'une remise en question des compétences de base des développeurs économiques : face à la grande technicité des problématiques et à la diversité des solutions, la formation de ces développeurs doit se concentrer sur la sensibilisation des acteurs économiques, sur la maîtrise des grandes démarches de transformation et sur la capacité d'orientation vers les bons guichets. La Métropole de Lyon met en place sur ces bases un parcours d'auto-formation de ces agents.
La mise en oeuvre progressive des Zones à Faibles Emissions (ZFE) va ouvrir de nouveaux champs d'accompagnement potentiels, sur les mobilités des entrepreneurs locaux. Les démarches actuelles ne sont donc qu’une première étape.